Mon père est un apostat et un athée. Il est mort depuis une semaine. Il a laissé des biens, une voiture et des dettes. Je sais que les biens qu’il a laissés ne m’appartiennent pas puisque selon mes connaissances, un musulman ne peut hériter d’un non musulman. Ceci dit, au vu de la loi, moi et ma sœur sommes considérés comme ses héritiers. Un homme qui prétend que mon père avait contracté une dette auprès de lui m’appelle quotidiennement et je n’ai pas les moyens de régler sa dette. Sachant que je n’ai pas vécu avec mon père et je ne sais pas ce qu’il faisait ? Je ne sais pas non plus si la dette en question est réelle ou si c’est un mensonge de qui la réclame. Tout comme mes oncles et mes tantes paternelles m’ont informé lors de son décès que les biens que mon père a laissé sont à l’origine les leurs puisqu’il a vendu la maison de leur père et dépensé l’argent sans le partager avec eux. Que dois-je faire ? Dois-je régler la dette ? Ou dois-je partager l’argent hérité entre mes oncles et tantes ? Ou devrais-je plutôt me tenir à l’écart de cet argent autant que faire se peut ? Ce qui d’ailleurs, est ce que je souhaiterais.
Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :
En premier lieu, nous attirons votre attention sur la gravité de juger d’une personne en particulier en tant qu’apostat sans une preuve religieuse pour ce faire. S’il est certain que votre père est mort en tant qu’apostat, alors il faut savoir que les avis des juristes sont divers pour statuer des biens de ce défunt s’il a été tué ou est mort, à qui doivent-ils revenir ?
Dans Al-Mawsû’a Al-Fiqhiyya il est dit : « Les juristes ont divergé au sujet des biens d’un apostat s’il est tué ou est mort en tant que tel. Ils ont émis trois avis :
1 : Tous ses biens doivent revenir de droit au Trésor Public. C’est l’avis de Malik, Châfi’î et Ahmad.
2 : Ses biens doivent revenir à ses héritiers de confession musulmane. Que ses biens aient été acquis durant la période où il était musulman ou suite à son apostasie. C’est l’avis de Abu Yûsuf et de Mohammed.
3 : Les biens qu’il a acquis durant la période où il était musulman doivent être remis à ses héritiers musulmans et ceux acquis suite à son apostasie doivent revenir au Trésor Public. Cet avis est celui de Abou Hanifa. » Fin de citation.
L’avis selon lequel nous délivrons nos fatwas sur cette question est le premier des trois cités. En revanche, si le pays n’agit pas en fonction de ce qui lui incombe en termes de gestion des biens du Trésor Public et transgresse les lois d’Allah le concernant, alors dans ce cas nous ne voyons aucun mal à ce que les héritiers agissent en fonction du deuxième avis qui dit de partager les biens du défunt entre ses héritiers musulmans. Ils sont plus en droit de recevoir les biens du défunt plutôt qu’un état qui en ferait usage pour semer le mal.
Pour ce qui est de la personne qui prétend que le défunt avait contracté une dette auprès de lui, ainsi que vos oncles et tantes qui prétendent détenir un droit sur l’héritage : il est obligatoire qu’ils produisent une preuve religieuse recevable de ce qu’ils avancent si les héritiers dont les propos sont recevables - c’est-à-dire qui sont pubères et doués de raison – ne les croient pas. Ceci en raison du hadith rapporté par Abou Horayra (qu’Allah soit satisfait de lui) dans lequel le Prophète () a dit : « Si on devait donner aux gens ce qu’ils prétendent détenir, ils revendiqueraient les vies et les biens des gens, mais le serment doit être prêté par l’accusé. » Dans une version de ce hadith rapporté par Al-Bayhaqî avec une chaine de transmission que Ibn Hajar juge authentique dans son livre Bulûgh Al-Marâm, il est dit : « Le plaignant est tenu d’apporter des preuves et l’accusé de prêter serment. »
Dans son livre Subul Al-Salâm, Al-San’ânî a dit : « Ce hadith prouve qu’on ne peut accepter les prétentions de quiconque uniquement parce qu’il le dit. Une telle assertion doit être accompagnée d’une preuve ou l’approbation de qui on réclame ce dû. » Fin de citation.
La preuve attestant d’une telle assertion se constitue au minimum d’un homme et deux femmes ou encore un témoin homme avec le serment de qui réclame le bien.
Il est dit dans le livre Al-Mughnî d’Ibn Qudâma : « Concernant les biens, on peut accepter à titre de preuve, et au minimum, le témoignage d’un homme et de deux femmes, ou celui d’un homme intègre accompagné du serment de qui prétend détenir le bien … la plupart des savants considèrent qu’un bien réclamé par une personne lui appartient effectivement s’il apporte le témoignage d’un homme accompagné de son serment. Cela a été rapporté par Abu Bakr, Omar, ‘Uthman, ‘Ali, qu’Allah soit satisfait d’eux. C’est aussi l’avis des sept juristes de Médine, de Omar ibn Abd Al-Aziz, Al-Hasan, Churayh, Iyyâs, Abdullah ibn ‘Utbah, Abu Salama ibn Abd Ar-Rahmân, Yahya ibn Ya’mar, Rabî’a, Malik, Ibn abi Layla, Abu Zinâd, Shâfi’î. » Fin de citation résumée.
Si la personne qui réclame la dette en question produit une preuve de ce qu’elle avance alors donnez-lui son dû. De même pour vos oncles et tantes s’ils produisent une preuve de ce qu’ils avancent. Mais si aucune preuve n’est présentée, rien ne vous incombe.
Et Allah sait mieux.
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