Il s'agit d'un projet stratégique qui, étant l'une des constantes de la politique de la Maison-Blanche, n’a jamais subi les aléas du changement des administrations et des présidents. Ainsi, ce projet, déjà mis en œuvre sous l'administration de l'ancien président, George W. Bush, est toujours source d'intérêt et de préoccupation de la part de l'administration Obama.
En effet, le Département d'Etat américain a récemment annoncé une nouvelle subvention dans le cadre du projet «Ponts culturels». Ce dernier est dédié aux jeunes nations où vit un nombre substantiel de musulmans, le but étant de « développer, chez les jeunes, des compétences en matière de leadership et de promouvoir les échanges culturels entre les jeunes musulmans et les jeunes américains ». En outre la subvention exige que l'âge de l'étudiant se situe entre 15 et 19 ans et que ce dernier ait le charisme du leadership.
L'étudiant (ou l'étudiante) admis(e) pour bénéficier de ladite subvention doit passer une année académique complète aux Etats-Unis chez une famille américaine, s'engager dans des activités qui lui permettront de connaître la société et les valeurs américaines et acquérir des compétences en leadership. Il (ou elle) doit aussi contribuer à faire connaître aux Américains la culture de son pays.
Le projet en question porte le nom de «Kennedy-Lugar» qui est celui de deux députés du Congrès : Robert F. Kennedy et Richard Lugar. Ils l'ont présenté au Sénat le 10 mai 2002 au nom de dix autres membres du Congrès.
Avant d'entrer dans les détails du projet, il convient de souligner que ses promoteurs font partie du lobby ultra-sioniste. En effet, Robert F. Kennedy, était, en novembre 1995, un partisan fervent du transfère de l'ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem, alors que Richard Lugar avait voté pour l'intervention militaire en Irak.
Quant au projet proprement dit, il bénéficie de la supervision du Département d'Etat américain qui, soit dit en passant, ne manque pas d'expérience dans le domaine des programmes d'échanges d'étudiants et de connaissances. Il a proposé l'allocation de vingt millions de dollars pour la mise en place d'un nouveau programme d'échange d'étudiants du secondaire en vue de financer une catégorie particulière d'étudiants du monde musulman. Il s'agit de ceux qui se sont distingués dans les écoles du gouvernement américain. Aussi, le projet exige que la sélection de ces étudiants se fasse sur une base compétitive qui, tout en mettant en exergue leur mérite, tient compte de la diversité géographique, du sexe ou encore des classes sociales et économiques auxquelles ils appartiennent.
En outre les deux promoteurs ont tenu à introduire une clause qui prévoit la supervision stricte des étudiants sélectionnés, car la loi « nous permettra d'améliorer notre capacité à filtrer et à surveiller les étudiants étrangers, en exigeant plus de communication et de coopération entre le Département d'Etat et le Département d'Immigration et de Naturalisation et les instituts scientifiques auxquels accèdent les étudiants étrangers, mais aussi à travers le colmatage des brèches au niveau du programme de surveillance des étudiants étrangers actuellement adopté ».
Il convient de noter que ces programmes d'échanges culturels et éducatifs ont connu - aux dires mêmes de leurs promoteurs - un énorme succès dans la promotion des valeurs américaines dans la mesure où ils ont permis à cinq mille Américains - au bas mot - de voyager à l'étranger et aux Etats-Unis de recevoir 20 000 étrangers sur leur territoire.
À cet égard, les promoteurs du projet font valoir que « pour faciliter la réalisation de l'objectif principal qui consiste à faire bénéficier les enfants et à les influencer, notre législation prévoit, avec le monde musulman, la création d'un nouveau programme pour les élèves du secondaire qui sont en constante augmentation. En effet, l'étape de la jeunesse est d’une importance capitale et celle de l'ouverture au monde est, chez les jeunes, la période la plus propice pour la promotion de la compréhension culturelle mutuelle, de la non-discrimination et de la tolérance. Et comme les élèves du secondaire d'aujourd'hui sont les leaders de demain, nous devons commencer dès maintenant à travailler avec eux pour concevoir et formuler leurs positions vis-à-vis de notre pays ».
Pour le sénateur Kennedy, le défi auquel les USA font face consiste à donner aux étudiants la possibilité de connaître tous les aspects de la vie familiale américaine et de comprendre ses valeurs sous peine de finir par haïr les Américains et donc de tomber dans l'extrémisme, voir le terrorisme (sic) ! Et il affirme qu' « on s'exposera certainement au danger si l'on ne tient pas compte de ces sentiments ; toutefois, si on essaye de traiter le problème par l'inculcation des valeurs américaines à des étudiants du monde musulman nous aurons devant nous, pour le long terme, une occasion de changer les attitudes négatives, même si cela doit prendre du temps. Aussi, le 11-Septembre nous a enseigné que nous devons commencer dès maintenant ! ».
Le sénateur Lugar explique, quant à lui, l'importance du choix de l'âge des candidats à l'américanisation, en disant : « Non seulement les élèves du secondaire apprennent vite, mais en outre ils ont une formidable capacité d'adaptation ».
Abondant dans le même sens, monsieur Kenton Keith, le directeur de l'Union pour les échanges culturels et éducatifs internationaux, un consortium qui comprend soixante-cinq organisations et qui possède des succursales dans chaque état américain, a fait, à l'appui dudit projet, le témoignage suivant : « […] pour gagner la guerre contre le "terrorisme", il n' y a pas que nos forces militaires, il y a aussi la nécessité impérative pour nous d'intéresser les peuples du monde musulman à nos valeurs et à notre société. C'est ce qui nous permettra de faire prévaloir convenablement la compréhension, la prise de conscience et le respect mutuel, et ce, afin de pouvoir jeter les bases de relations pacifiques fructueuses. Ceci dit, sachez que les échanges «estudiantins» approuvés par votre projet constituent le moyen le moins coûteux si l'on veut encourager des relations personnelles et institutionnelles qui permettront d'améliorer notre sécurité nationale dans le long terme […]. Comme il est du devoir des Etats-Unis de répondre, à plusieurs niveaux, à la "menace terroriste", nous devons nous assurer que nos défenses sont solides et que nos frontières sont en sécurité ».
Ce projet est le reflet de la volonté de la Maison-Blanche, des piliers de l'administration américaine et de ses centres de recherche de gagner les cœurs et les esprits de la jeunesse musulmane. Ils y voient tous un impératif national pour protéger, dans le long terme, la sécurité nationale américaine contre ce qu'ils appellent le «terrorisme» et l'éveil islamique. Que ferons-nous alors ? Une chose est sûre : notre décision, après le déclenchement des révolutions triomphantes du "printemps arabe", nous appartient désormais en tant que peuples, en tout cas nous l'espérons.