La gratitude - II
Encore une fois, connaitre et reconnaitre les bienfaits, ainsi que leur source, constitue la première étape et précède les remerciements à Allah. Reconnaitre des bienfaits, tels que la possibilité de bouger, de marcher, de travailler, de faire de l’exercice, de dormir, de manger, etc. Tous proviennent du grand bienfait d’être en bonne santé. La faveur d’être humain, la faveur d’être musulman, la faveur d’être guidé, la faveur d’être bien élevé, la faveur d’être un prophète (quand cela s’applique à ceux qu’Allah a choisis) sont également de grands bienfaits à méditer. Il est très important de mentionner cette question, lorsque vous invitez les gens à embrasser la religion d’Allah. Allah nous rappelle Ses faveurs envers nous, à maintes reprises et dans différentes parties du Coran.
Allah dit (selon la traduction du sens du verset) :
« Allah […] a soumis à votre service les vaisseaux qui, par Son ordre, voguent sur la mer. Et Il a soumis à votre service les rivières. Et pour vous, Il a assujetti le Soleil et la Lune à une perpétuelle révolution. Et Il vous a assujetti la nuit et le jour. Il vous a accordé de tout ce que vous Lui avez demandé. Et si vous comptiez les bienfaits d’Allah, vous ne sauriez les dénombrer. L’homme est vraiment très injuste, très ingrat. » (Coran 14/32-34)
Il y a beaucoup d’autres versets dans le Coran dans lesquels Allah nous rappelle les faveurs qu’il nous a accordées. Une façon d’inviter les gens à [embrasser la religion] d’Allah consiste à leur rappeler Ses bienfaits envers eux afin qu’ils soient reconnaissants et qu’ils ne fassent pas partie de ceux à qui Allah dit (selon la traduction du sens du verset) :
« […] Certes, Allah est Détenteur de la Faveur envers les gens, mais la plupart des gens ne sont pas reconnaissants. » (Coran 2/243)
Certaines personnes attribuent les bienfaits dont ils jouissent à une source, autre que la source réelle (c’est-à-dire Allah), comme l’a fait Qârûn (Coré), lorsqu’il a déclaré, après qu’on lui ait mentionné les faveurs d’Allah à son égard (selon la traduction du sens) :
« [Qârûn a dit :] ‘C’est par une science que je possède que ceci m’est venu’ […] » (Coran 28/78)
C’est l’arrogance qui conduit à une telle réaction. Celle-ci engendre la perdition pour de telles personnes, car Allah dit (selon la traduction du sens du verset) :
« Tout ce que vous avez, comme bienfait, provient d’Allah […] » (Coran 16/53)
Exprimer sa gratitude par la langue
La langue d’une personne reflète ce qu’elle cache dans son cœur. Ainsi, lorsque son cœur est submergé par la gratitude envers Allah, la langue exprimera constamment des louanges et sa gratitude envers Lui. Toute personne devrait réfléchir à la façon dont le Prophète () aurait effectué le Dhikr (l’évocation d’Allah) et le Du’â’ (l’invocation d’Allah) pour voir combien de gratitude et de louanges ils contenaient.
· Chaque fois qu’il () se réveillait, il disait :
« Toutes les louanges sont dues à Allah, Celui qui nous a ramenés à la vie, après nous avoir fait mourir, et c’est vers Lui que s’effectuera le retour. »
· Chaque fois qu’il () se couchait, il disait :
« Toutes les louanges sont dues à Allah, Celui qui nous a nourris, qui nous a donné à boire, qui nous a satisfaits et qui nous a protégés. Nombreux sont ceux qui n’ont personne pour subvenir à leurs besoins ou leur offrir un abri. »
· Certaines de ses invocations régulières du matin et du soir étaient :
« Ô Allah ! Quelle que soit le bienfait dont je bénéficie ou dont bénéficie l’une de Tes créatures, il provient uniquement de Toi. Il n’y a pas de partenaire avec Toi ! Toutes les louanges et les remerciements Te sont dus. »
· Il () implorait le pardon [d’Allah] en disant :
« Je cherche refuge en Toi contre le mal de ce que j’ai fait. Je reconnais les faveurs que Tu m’as accordées, et je confesse mes péchés, alors pardonne-moi. »
· Toutes ses supplications auraient commencé par la louange d’Allah, dont Il est tout à fait digne.
· Il () aurait commencé tous ses discours en louant Allah.
· L’invocation d’ouverture pour la prière (la sourate Al-Fâtihah), les supplications dites au cours de l’inclinaison, celles de la prosternation et ses invocations concluant ses prières étaient toutes remplies de louange et de gratitude envers Allah.
· Chaque fois qu’il () souhaitait manger, boire, voyager ou [même] lorsqu’il éternuait, il louait Allah et le remerciait.
· Lors d’une nuit, où c’était le tour de ‘Âichah, qu’Allah soit satisfait d’elle, elle a commencé à le chercher dans le noir en se servant de sa main, puis sa main a touché les siennes et elle l’a entendu dire :
« Ô Allah ! Je cherche protection contre Ta colère dans Ta satisfaction. Je cherche protection dans Ton pardon contre Ton châtiment. Je ne suis pas capable d’énumérer les louanges qui Te sont dues. Tu es comme Tu t’es louangé d’être. »
Exprimer sa gratitude par les membres de son corps
Tout acte pieux ou tout acte d’obéissance que la progéniture d’Âdam (Adam), , accomplit est une forme d’expression de sa gratitude envers Allah, le Seigneur. Il y a différents moyens d’exprimer la gratitude par son corps. L’un de ces moyens est de suivre l’instruction du Prophète Mohammed () quand il a dit :
« Lorsque vous vous levez le matin, une charité est due pour chacune de vos articulations : il y a de la charité dans chaque attribution de gloire à Allah ; il y a de la charité dans chaque déclaration de Sa grandeur ; il y a de la charité dans chaque énonciation de Sa louange ; il y a de la charité dans chaque déclaration qu’Il est le seul vrai Dieu (digne d’adoration) ; il y a de la charité à enjoindre le bien et il y a une charité à interdire le mal. Les deux Raka'ah (unités de prières) de Duhâ (l’avant-midi) sont égales à tout cela (en récompense). »
Ainsi, tout ce qui est mentionné, dans la narration ci-dessus, est un acte pieux qui reflète la gratitude envers Allah. Une personne devrait déployer tous les efforts possibles pour remercier Allah, en utilisant l’ensemble des membres de son corps et ne devrait jamais sentir qu’elle L’a remercié suffisamment, ou qu’elle n’a pas besoin de le refaire, le lendemain.
Il n’y a pas de contradiction entre remercier les gens et être reconnaissant envers Allah, car Allah nous commande de remercier et de récompenser ceux qui nous font des faveurs. Les plus importants d’entre eux sont les parents, comme Allah le dit (selon la traduction du sens du verset) :
« […] Sois reconnaissant envers Moi ainsi qu’envers tes parents […] » (Coran 31/14)
Le problème est quand une personne remercie les gens, mais délaisse le remerciement d’Allah. Agir de la sorte s’avère absolument désastreux. De plus, il y a une différence dans la manière dont on remercie les gens et celle par laquelle on remercie Allah. Nous disons être soumis et humble en remerciant Allah, parce que cela est un reflet de notre servitude envers Lui. Par contre, on ne peut pas faire de même avec d’autres êtres humains. Il faut plutôt implorer pour leur pardon [de la part d’Allah] et les louer. Celui qui ne remercie pas les autres est méchant et il est peu probable qu’il remercie Allah et exprime sa gratitude envers Lui.
De plus, les faveurs et les bienfaits d’Allah sont préservés et même augmentés lorsqu’une personne est reconnaissante.
Qu’est-ce qui aide une personne à être reconnaissante ?
· En observant la condition de ceux qui ont un statut inférieur à soi et en se rappelant, lorsque l’on voit ceux qui ont un statut plus élevé, que ce n’est que par le décret d’Allah.
Allah dit (selon la traduction du sens du verset) :
« C’est Lui qui a fait de vous les successeurs sur la Terre et qui vous a élevés, en rangs, les uns au-dessus des autres, afin de vous éprouver en ce qu’Il vous a donné […] » (Coran 6/165)
· En réalisant que l’on aura à rendre des comptes, à propos de ces bienfaits, comme l’a dit Allah (selon la traduction du sens du verset) :
« Puis, assurément, vous serez interrogés, ce Jour-là, sur les plaisirs [dont vous avez joui en ce Monde]. » (Coran 102/8)
Même les bienfaits, aussi mineurs que l’eau froide, ne sont pas appréciés comme il se doit. Certaines personnes se privent d’apprécier ce genre de bienfait, en raison de leur incompréhension du concept de gratitude. En réalité, ces bienfaits nous ont été confiés afin que nous en jouissions.
Allah dit (selon la traduction du sens du verset) :
« Ô vous les croyants ! Mangez des (nourritures) licites que Nous vous avons attribuées, et remerciez Allah, si c’est Lui que vous adorez. » (Coran 2/172)
Ainsi, la gratitude ne peut pas conduire à considérer ce qui est licite comme étant illicite (l’un des principes des [sectes] soufies). Si la gratitude était une condition préalable pour pouvoir jouir des bienfaits d’Allah, alors personne n’aurait été en mesure de profiter de bienfaits, de faveurs ou d’avantages d’Allah. En effet, personne ne peut faire suffisamment de bonnes actions pour exprimer, de manière appropriée, sa gratitude envers Allah, pour ce qu’Il nous a accordé. La solution consiste donc à utiliser ces bienfaits et ces faveurs, d’une manière qui plaise à Allah, à Le remercier et à implorer Son pardon pour nos manquements - et ce peu, de notre part, sera accepté par Allah.
· En priant Allah de nous aider à Lui être reconnaissants, par l’invocation dans laquelle le Prophète () a enseigné à Mu’âth, qu’Allah soit satisfait de lui, de dire :
« Ô Allah ! Aide-moi à me souvenir de Toi, à exprimer ma gratitude envers Toi, et à T’adorer de la meilleure manière. »
En ce qui concerne la piété, il est préférable d’être reconnaissant, lorsqu’on est comblé d’un bienfait, que de patienter lorsqu’on est affligé. Allah aime voir les effets de ses bienfaits [sur Ses serviteurs]. Une fois, Imrân ibn Husayn, qu’Allah soit satisfait de lui, est sorti vêtu d’un vêtement luxueux et quand il a vu la manière dont ses amis le regardaient, il a dit :
« Le Prophète () a dit :
· ‘Allah aime voir les effets de Ses bienfaits sur Ses serviteurs.’
· ‘Mangez, buvez et donnez la charité sans arrogance ni exagération, car Allah aime voir l’effet de Ses bienfaits sur Son serviteur.’ »
Par conséquent, la limite, lorsque l’on exprime et que l’on montre l’effet des faveurs d’Allah sur soi, est de ne pas faire montre de vantardise ou d’en tirer une fierté, ni d’exagérer.
Allah déteste les Kanûd (voir la définition plus bas) ou les ingrats et Il les châtie. L’imam Al-Hasan, qu’Allah lui fasse miséricorde, a dit :
« Un Kanûd, est une personne qui se souvient des catastrophes qui lui sont arrivées et qui oublie toujours de mentionner les bienfaits d’Allah [sur lui]. »
Cette qualité est plus apparente chez les femmes. Par exemple, le mari d’une femme est bon avec elle pendant de nombreuses années, mais dès qu’elle subira une légère lacune de sa part, elle lui dira immédiatement qu’elle n’a jamais rien vu de bon de sa part. C’est une forme d’oppression du mari et c’est en conséquence de cela que la majorité des habitants de l’Enfer seront des femmes. La raison étant qu’elles sont ingrates envers leurs maris. Si être ingrat envers son mari entraine le châtiment de l'Enfer, qu’en sera-t-il pour ceux qui auront été ingrats envers Allah ?
'Umar ibn ‘Abdulazîz, qu’Allah soit satisfait de lui, considérait les bienfaits d’Allah à son égard et disait :
« Ô Allah ! Je cherche refuge auprès de toi afin que je ne rencontre pas Tes faveurs avec ingratitude ou que je les nie, après les avoir connues, ou de les oublier sans les mentionner avec des éloges (c’est-à-dire Te louer). »
Il est également recommandé de se prosterner à chaque fois que l’on reçoit des nouvelles, concernant un nouveau bienfait ou une faveur d’Allah à notre égard, comme le Prophète () avait l’habitude de le faire. De la même manière, quand Abu Bakr, qu’Allah soit satisfait de lui, a reçu la nouvelle que le menteur Musaylamah (qui prétendait être un prophète, suite au décès du Prophète, ,) a été tué, il s’est prosterné. Ka'b ibn Mâlik, qu’Allah soit satisfait de lui, s’est également prosterné quand il a reçu la bonne nouvelle du pardon d’Allah, après qu’il se soit abstenu de prendre part à une bataille.
D’un autre côté, il ne faut pas exagérer les prosternations pour qu’elles deviennent une pratique quotidienne. Cela doit être uniquement quand on reçoit de bonnes nouvelles ou une nouvelle bénédiction. Un exemple d’une bonne nouvelle ou d’une bénédiction est l’incident qui s’est produit quand un des pieux prédécesseurs se cachait d’Al-Hajjâj. Il s’est prosterné au moment où il a appris la nouvelle de la mort de ce dernier. En effet, la mort d’un tyran est une grande bénédiction et une faveur d’Allah. Également, la nouvelle d’un nouveau-né ou d’une victoire des musulmans sur les incroyants justifie une telle prosternation.
Ibn al-Qayyim, qu’Allah lui fasse miséricorde, a dit :
« La religion se compose de deux moitiés : l’une d’entre elles est représentée par la gratitude et l’autre moitié, par la persévérance. »
Les érudits ont émis des avis divergents sur la question à savoir celui qui est le meilleur : un riche reconnaissant ou un pauvre patient. Il semble préférable que le riche soit reconnaissant et que le pauvre persévère.