Imaginez une mosquée où l’imam fait une pause pendant la prière et où la congrégation entière attend qu’un enfant finisse de jouer. Imaginez une mosquée où un imam dirige la prière tout en portant un enfant dans ses bras. Imaginez une mosquée où les pleurs d’un bébé fassent que l’imam change son intention et réduise le temps de la prière pour la congrégation en entier.
Telle était la mosquée du Prophète (). Ces exemples sont mentionnés dans le hadith suivant :
Chaddâd, qu'Allah soit satisfait de lui, raconta que le Messager d’Allah () sortit et se dirigea vers nous pour accomplir l’une des deux prières de l’après-midi (Dhohr- ‘Asr) et il portait al-Hasan ou al-Husayn, qu'Allah soit satisfait d’eux. Le Prophète () se plaça en position d’imam et déposa l’enfant par terre. Il () prononça le Takbîr (Allah est le plus Grand) pour commencer la prière et se mit à prier. Pendant la prière, il accomplit une très longue prosternation ; je levai alors la tête et je vis l’enfant sur le dos du Prophète () qui était prosterné. Je repris alors ma prosternation. Quand le Messager d’Allah () eut terminé la prière, les gens demandèrent : « Ô Messager d’Allah ! Au milieu de ta prière, tu as effectué une prosternation et tu l’as tellement prolongée que nous avions pensé que quelque chose s’était passé ou que tu recevais une Révélation ! » Il répondit : « Ni l’un ni l’autre, En fait, mon petit fils a fait de moi sa monture, et je n’ai pas voulu le brusquer en me relevant ; j’ai préféré attendre qu’il en ait assez. » (al-Nasâ`î, Ibn ‘Asâkir, al-Hâkim).
Ou encore
Le Messager d’Allah () priait en portant Umâma Bint Zaynab, fille du Prophète (). Il la déposait par terre quand il se prosternait et la soulevait quand il se remettait debout. (Boukhari et Mouslim)
Le Prophète () a dit :
« Quand je m’apprête à accomplir la prière, j’ai l’intention de la prolonger, mais quand j’entends les pleurs d’un enfant, je la réduis, car je déteste déranger la mère de l’enfant. » (Boukhari)
Ces scénarios illustrent combien il était naturel de voir les bébés, bambins et enfants dans la mosquée du Prophète (). Cela nous montre que le Prophète () comprenait la nature des enfants et qu’il faisait attention à leurs besoins et à leur confort dans la mosquée.
Témoignons-nous de ces mêmes scénarios dans nos mosquées aujourd’hui ? Nous voyons un enfant qu’on saisit et à qui l’on ordonne : « Assieds-toi et reste calme », car il était en train de courir entre les rangées. Ou nous entendons : « Ma sœur, pouvez-vous sortir», parce que son enfant pleurait. Ou nous lisons des pancartes qui disent : « Les enfants ne sont pas admis à la mosquée. »
En Amérique du Nord, nous avons grandement besoin que les imams de nos mosquées suivent l’exemple (de la mosquée) du Prophète () et qu’ils accueillent les enfants au lieu de les écarter. Pourquoi ? Pour le bien-être de nos mères et pour l’avenir de nos enfants (qui prendront la mosquée en charge à l’avenir).
Pas d’enfant = pas de mères.
Quand les enfants ne sont pas les bienvenus dans la mosquée, naturellement, les mères ne le sont pas non plus.
Après une longue journée passée à la maison avec des enfants chahuteurs et des plats sales, où est-ce que ces mères devraient-elles aller pour apprendre, socialiser et donner à leurs enfants l’occasion de courir, et d’avoir la possibilité, tellement souhaitée, de changer d’air ? S’ils ne vont pas à la mosquée, ils peuvent finir par se diriger vers les centres commerciaux où leurs enfants seront exposés à la musique, aux tenues légères, et aux divertissements tentants.
Nos mosquées devraient être des centres communautaires qui donnent aux mères et à leurs enfants l’occasion d’établir des amitiés saines, d’absorber les rappels hebdomadaires et de discuter de leurs besoins, que ce soit le besoin d’une baby-sitter musulmane ou d’une bonne recette.
Pas d’enfants= pas d’avenir
Si la mosquée n’accueille pas les enfants, ces derniers trouveront d’autres lieux à fréquenter. A la mosquée, les enfants reçoivent souvent des critiques à cause du bruit qu’ils font, de la manière dont ils s’habillent, du fait qu’ils jouent au basketball au lieu d’accomplir les prières surérogatoires, et ainsi de suite. Dans la cour d’école, les enfants reçoivent des éloges pour leurs blagues, leurs vêtements et leurs capacités sportives. Où nos enfants préféreront-ils passer leur temps ?
Les enfants s’épanouissent quand ils ont un sentiment d’appartenance. Si nous voulons que nos enfants aient le sentiment d’appartenir à la communauté musulmane, ils doivent se sentir les bienvenus à la mosquée. Les enfants qui courent dans les couloirs ou qui jouent au basketball sur l’aire de stationnement, ne sont pas des signes d’une mosquée à problèmes ou d’enfants qui se comportent mal. Ce sont les signes d’une communauté florissante dans laquelle les enfants établissent des amitiés qui relient leur cœur et leur esprit à la mosquée.
Les enfants ont besoin de développer ce lien dès le départ. Une fois qu’ils deviendront grands et prendront l’habitude de fréquenter d’autres lieux, il sera peut-être trop tard pour que la mosquée trouve sa place dans leur cœur.
Tolérer un peu de bruit et de jeux est un sacrifice bien minime pour construire une communauté musulmane future positive.
La nature des enfants :
Il est évident que les jeunes enfants peuvent déranger les adorateurs pendant la prière. La plupart des pères et mères ont rarement l’occasion de prier sans être distraits par leurs bébés, bambins et jeunes enfants, qu’ils soient à la maison ou à la mosquée. C’est la nature des enfants, telle qu’Allah, Exalté soit-Il, l’a créée- ils débordent d’énergie et d’enthousiasme et manquent de maîtrise de soi. Connaissant leur nature, le Prophète () corrigeait les enfants (et les adultes) avec miséricorde et compassion. Ci-après un exemple de la manière dont le Prophète () traitait Anas ibn Mâlik, qu'Allah soit satisfait de lui, qui était son serviteur quand il était enfant :
Le Prophète () envoya Anas faire une course et Anas raconta : « Je suis parti jusqu’à ce que je rencontre des enfants en train de jouer dans la rue. Ensuite, le Messager d’Allah me prit par la nuque. Quand je l’ai regardé, il m’a souri et m’a dit : ‘Unays (surnom de Anas) t’es-tu rendu là où je t’ai ordonné d’aller ?’ J’ai répondu : ‘Oui ô Messager d’Allah, j’y vais de ce pas.’ Anas a ajouté : ‘J’ai été à son service pendant neuf années, durant lesquelles il ne m’a jamais dit au sujet de quelque chose que j’avais fait : « Pourquoi as-tu fait ceci ?», ou au sujet de quelque chose que j’avais négligé de faire « Pourquoi n’as-tu pas fait ceci ?’ » (Mouslim)
Le Prophète () n’a pas admonesté Anas pour avoir oublié sa course ou pour quoi que ce soit d’autre en neuf ans.
Dans un autre exemple, un garçon fut emmené au Prophète () car il jetait des pierres sur les arbres et volait les dattes.
Le Prophète () dit : «Ô gamin, pourquoi jetais-tu des pierres sur les dattiers ? » Il dit : « pour manger. » Le Prophète () dit : « Ne jette pas des pierres sur les dattiers mais mange de ce qui en tombe par terre. » Ensuite, il passa ses mains sur la tête du garçon et dit : ‘ Ô Allah, emplis son estomac.’ » (Abû Dâwûd).
Au lieu de le réprimander ou de le punir, le Prophète () invoqua Allah, exalté soit-Il, en faveur du garçon.
Cinq conseils pour accueillir les enfants à la mosquée :
Une mosquée qui accueille les enfants ne doit pas forcément être un lieu bruyant et incontrôlé. Ci-après cinq conseils pour bien vous comporter avec les enfants à la mosquée :
1. Corrigez gentiment
Anas ibn Mâlik rapporta que « le Prophète () n’utilisait ni les insultes ni un mauvais langage ou les jurons. » (Boukhari)
Rappelez-vous que les enfants sont sans péchés, mais que les adultes ne le sont pas. Allah, Exalté soit-Il, ne punit pas les enfants pour leur mauvaise conduite, mais Allah, Exalté soit-Il, nous demandera des comptes à propos de notre manière de traiter les enfants.
Notre devoir est de rappeler gentiment aux enfants les bienséances relatives à la mosquée. Nous ne pouvons pas obliger un enfant, ou même un adulte, à obéir. Les enfants de tous âges, s’arrêteront et écouteront une personne qui sourit, qui dit ‘Assalâmu ‘Alaikum’, qui leur parle et montre de l’intérêt pour leurs besoins. Les enfants ignoreront, éviteront, et insulteront une personne qui les traite avec dureté, colère et insultes.
2. Offrez votre aide :
Au lieu de regarder un père courir derrière un bambin plein d’énergie ou une mère qui lutte pour calmer un bébé, offrez-lui de l’aide. Un ‘Est-ce que je peux garder votre fils pendant que vous priez’ ou ‘voudriez-vous que je porte votre sac de couches’ dit poliment, équivaut à une Sadaqa (aumône) pour vous, et aide les parents à maîtriser leurs enfants.
3. Organisez des séances de rappel :
La mosquée peut fournir fréquemment aux parents et aux enfants, des rappels sympathiques au sujet des règles et bienséances relatives à la mosquée.
4. Créer des commodités adaptées aux enfants :
S’assurer que les toilettes de la mosquée sont équipées d’une table à langer pour éviter les taches et les odeurs sur les tapis de prière. Fournissez une salle ou des séparations pour les mères qui allaitent. Mettez à la disposition des parents un aspirateur ou un ballet pour leur permettre de nettoyer les saletés de leurs enfants. Placez le Coran hors de la portée des bambins.
5. Ouvrez une salle pour parents :
Consacrez une salle de prière à part pour les parents qui viennent avec leurs enfants. Emplissez-la avec des jouets et des outils de travaux manuels. Organisez un service de garderie lorsque vous vous attendez à accueillir de nombreux d’enfants, tel que pendant la prière du vendredi et des tarâwîhs ou pendant les leçons religieuses. La plupart des parents sont prêts à payer une cotisation minimale pour profiter de l’occasion rare de prier et d’écouter une conférence sans leurs enfants.
Comme le mois de Ramadan continue et que les mosquées sont pleines d’adorateurs, faisons en sorte que nos mosquées accueillent les enfants avec le même soin, attention et compassion, que la mosquée du Prophète ().