Voici donc notre second article traitant de la République centrafricaine, il évoquera spécifiquement la crise traversée par le pays et notamment par les musulmans qui y vivent.
La crise actuelle :
Le cas du président François Bozizé est une clé permettant de saisir l’ampleur du complot qui déstabilise actuellement la République centrafricaine ; en effet, Bozizé était un président chrétien inféodé à la France comme tous ceux qui l’ont précédé d’ailleurs, c’est ainsi qu’à deux reprises Bozizé put s’appuyer sur l’aide politique de la France : la première fois c’était au début des années 80 du siècle dernier et la seconde c’était au début de la décennie suivante. On peut dire par ailleurs que durant le mandat de Bozizé le niveau de corruption atteignit de grandes proportions ; ainsi, à titre d’exemple, il fit tout ce qui était en son pouvoir afin de se prémunir contre l’épidémie des coups d’Etat répandue sur le continent africain, et pour ce faire il s’appuya sur son expérience et son expertise dans le domaine militaire, et pendant ce temps-là il négligeait totalement les affaires de son pays, pire, afin de mener à bien ses buts personnels, il poussa à l’affaiblissement de l’armée de son pays. De surcroît, il mit la main sur les mines d’uranium et de cuivre de même qu’il distribua une partie des richesses du pays à ses alliés français et occidentaux, et ce, afin de gagner leurs faveurs, mais surtout leur soutien dans sa lutte contre l’opposition armée incarnée notamment par la coalition des combattants du Seleka, laquelle opposition s’est renforcée et durcie à partir de ce moment-là. Le feu aux poudres a été mis par l’annulation par Bozizé d’un accord concernant le partage du pouvoir qui avait été signé en janvier 2013, cet accord prévoyait en outre une libération de tous les prisonniers politiques et l’incorporation des éléments de la coalition des combattants Seleka au sein de l’armée nationale du pays, mais Bozizé viola cet accord et il ne put donc être mis en œuvre.
La coalition des rebelles Seleka de cinq groupes distincts s’opposant par les armes au pouvoir du président Bozizé, on estime que cette coalition rassemble environ 25 000 combattants, on trouve parmi eux à la fois des musulmans et des chrétiens, de même que les rangs de ce groupe armé sont constitués de Centrafricains, de Soudanais et de Tchadiens. Notons que rien ne prouve que ces combattants appartiennent à des groupes islamiques djihadistes comme le prétend la France ou le disent certains rapports occidentaux. Cette coalition des rebelles Seleka a été dirigée par Michel Djotodia, qui comme son prénom ne l’indique pas est musulman, ce dernier, qui fonda la coalition en 2005, réussit en mars 2013 à renverser Bozizé suite à la prise du palais présidentiel par la coalition, dans la foulée il se déclara « président de la République » et Bozizé fut contraint de fuir vers le Cameroun. Suite à cette prise de pouvoir, le pays connut plusieurs mois de combats opposant la coalition des rebelles Seleka et les milices d’auto-défense chrétiennes et animistes fidèles à l’ex-président Bozizé, ces milices sont plus connues sous le nom d’Anti-balaka.
En septembre 2013, Michel Djotodia annonça officiellement la dissolution de la coalition des rebelles Seleka, de plus il fit de sérieux efforts afin d’intégrer les combattants de la coalition dans l’armée régulière, car en effet il restait une partie de ces forces rebelles livrées à elles-mêmes. Puis en décembre de la même année, les forces armées françaises, en coopération avec les diverses forces armées africaines présentes dans le pays, désarmèrent plus de 7000 combattants de la coalition et elles les entreposèrent dans les diverses garnisons de la capitale. Cette mesure mit le feu aux poudres une seconde fois, car les musulmans pensaient au départ que ces forces françaises étaient là pour les protéger contre les agressions et exactions des milices Anti-balaka ; ainsi, les musulmans sortirent dans les rues de la capitale Bangui afin de manifester contre cette prise de position française antimusulmane faisant le jeu des Anti-balaka. Ces manifestations prirent l’allure d’une véritable insurrection populaire, les manifestants mirent en place des barricades faites de pierres et de pneus de voitures afin de protester contre les forces françaises désormais vues par eux comme étant des forces d’occupation.
Ces faits eurent pour conséquence le fait que Bozizé tenta de profiter de la situation en appelant à l’aide les Français pour qu’ils contrent les forces de la coalition ; cependant, la réponse de ces derniers fut un refus extrêmement clair, et le président français François Hollande a affirmé que les soldats français se trouvant dans le pays ne serviraient pas à défendre le gouvernement déchu de Bozizé. On peut penser que le rapprochement économique effectué par Bozizé entre son pays et la Chine et les Etats-Unis aux dépends de la France ainsi que ses tentatives de changer ses gardes tchadiens, qui sont des partisans de la France, par d’autres venus du sud de l’Afrique, furent parmi les principales causes de l’abandon de Bozizé par la France dans cette situation. Toutefois, le fait que la France ait perdu de son influence en République centrafricaine et que le pays soit passé entre les mains de Michel Djotodia et de la coalition des rebelles Seleka, qui incarnent d’une certaine manière un pouvoir islamique, dérangeait réellement l’ancienne puissance coloniale, et c’est ainsi que cette dernière alluma une nouvelle fois le feu de la zizanie entre les musulmans et les chrétiens. On peut affirmer que le chaos ethnico-confessionnel déclenché par la France à cette occasion n’a aucun équivalent dans toute l’histoire de cette société pacifiste. Ainsi, cette dernière a finalement soutenu les Anti-balaka et les a encouragés dans leurs actions sanglantes contre les musulmans, et notamment en confisquant les armes des rebelles Seleka, ce qui les affaiblit considérablement et en fit des proies faciles pour les milices chrétiennes. De plus, la France envoya des contingents de soldats supplémentaires en République centrafricaine, ce qui amena le nombre de ces derniers dans le pays à mille. Mais en dépit de ce grand nombre, les organisations internationales accusent les forces de maintien de la paix présentes là-bas de ne pas correctement accomplir leur mission de sécurisation et protection des populations musulmanes et de ne pas tout faire pour briser la domination des milices chrétiennes Anti-balaka qui s’attaquent à des musulmans tous les jours ; ce constat amer nous amène donc à nous poser la question suivante : quelle est donc réellement la mission de ces forces étrangères ?!
L’ampleur des massacres et des violences dont sont victimes quotidiennement des milliers de musulmans jusqu’à présent, la nature barbare et sanglante de ces exactions, le fait que les lieux de culte musulman soit systématiquement visés par ces violences et eux seulement ou encore la fuite de dizaines de milliers de musulmans vers les Etats frontaliers afin d’échapper à ces terribles massacres perpétrés par les milices chrétiennes, tout cela nous stupéfait et nous amène à nous interroger : si à l’origine les combats avaient pour motif la captation des richesses naturelles présentes en République centrafricaine, parmi lesquelles on trouve entre autres l’or, l’uranium, diverses sources d’énergie ou encore le bois ; si cette guerre civile n’a pour origine que la convoitise économique et la lutte, entre elles, des puissances financières étrangères avec d’un côté la France et de l’autre côté la Chine et les Etats-Unis ; si effectivement c’est là le dessous des cartes et la trame de ce conflit, alors quel est le lien entre cette réalité et le fait que les musulmans soient particulièrement visés ?! Pourquoi les mosquées sont des cibles de ces violences alors qu’il s’agit en principe d’une lutte économique ?! Pourquoi les musulmans sont massacrés sans pitié, et seulement les musulmans, alors que c’est une guerre économique ?!
Il est parfaitement impossible d’écarter le fait qu’il se joue actuellement en République centrafricaine une lutte confessionnelle, nous savons en analysant l’histoire que les convoitises économiques et matérielles qui sous-tendaient de nombreuses entreprises menées par l’Occident étaient souvent accompagnées d’autres intentions et notamment religieuses, et ceci est vrai depuis les croisades jusqu’aux événements actuels qui déchirent les pays musulmans. En fait, les faits nous montrent que les deux luttes sont inséparables, et on peut même dire que la préoccupation religieuse et le sentiment de vengeance que l’Occident garde au fond du cœur dépasse n’importe quelle autre préoccupation. Ainsi, les conquêtes musulmanes qui pénétrèrent au cœur de l’Europe, et qui atteignirent la France elle-même et arrivèrent même aux portes de Paris, ne furent jamais oubliées par l’Occident, bien au contraire, ces dernières étaient bien présentes dans son esprit jour après jour. En commençant par la Reconquista en Espagne, en passant par les guerres contre l’Iraq et l’Afghanistan et en terminant par la situation actuelle du Mali, de la République centrafricaine et de bien d’autres pays encore, il nous est possible de dire qu’à chaque fois planait l’ombre de la croix et c’est elle qui au fond a insufflé et insuffle encore l’esprit de ces expéditions guerrières, avec au-dessus d’elle évidemment l’étoile de David.