Ayant, dans un premier article, parlé de la violence domestique contre les femmes et les enfants, nous allons - avec l’aide d’Allah- dans ce présent article évoquer la violence subie par les personnes âgées et les domestiques.
Rappelons ce que nous avons dit dans le premier article : « L'ère de l’ignorance de la période préislamique prend fin avec l’arrivée du Prophète de la Miséricorde () pour que commence avec le 20e siècle une nouvelle ère d'ignorance et d’insouciance, accompagnée de son corollaire de comportements plus graves et plus horribles. Désormais l’infanticide ne se limite plus à l’assassinat des petites filles et de certains petits garçons, mais il émerge sous la bannière de la violence domestique qui décime les enfants, les femmes, les personnes âgées et les domestiques. Il peut aussi prendre d'autres formes qui consistent à "assassiner" leur innocence, leur volonté, leur liberté, leur dignité et leurs droits par des abus tantôt physiques, tantôt verbaux, tantôt psychologiques. »
Le respect des personnes âgées et des infirmes est, chez les communautés musulmanes, une habitude invétérée et, chez les personnes de bon cœur, un réflexe instinctif. Comment peut-il en être autrement alors qu’Allah le Tout Puissant a subordonné Sa vénération et Sa révérence à leur respect comme le dit le Prophète () dans hadith déclaré authentique par Al-Albani dans Sahih Al-Jamé : « Honorer un vieux musulman relève de la révérence d’Allah. »,ce qui veut dire que le respect qu’on accorde aux musulmans âgés dans les places publiques, de même que la gentillesse, la tendresse et la compassion qu’on leur montre sont autant de signes de la révérence qu’on fait à Allah en raison de la place hautement honorable que ceux-ci occupent chez Lui." (Voir ‘Awn Al-Ma’boud explication des sounan Abou Dawoud)
Toutefois, cet état de choses a été remis en question par les bouleversements graves ayant intervenu et qui ont engendré des comportements négatifs envers les musulmans âgés, comportements qui, bien que limités par rapport à ceux enregistrés dans les autres communautés, n’en sont pas moins inquiétants et préoccupants. Ils méritent donc une attention particulière en raison de leur gravité et de leur impact négatif sur la cohésion sociale et sur la solidarité familiale.
Les parents et les personnes âgées étaient, à un moment donné de l’histoire, les précurseurs de la renaissance de notre Oumma, la cause de notre développement et la couronne qui ornait nos têtes. C’est leur empreinte qui a fait que nous ayons, grâce à Allah, un caractère distinctif. Chacun d'eux était un précurseur sage au sein de sa famille et de sa société. Il n'est donc pas acceptable d'en faire, après tant de bons et de loyaux services, un reclus oublié dans un coin, de le considérer comme étant un obstacle sur la voie de notre développement ou de ne pas le récompenser, après être devenu faible alors qu’il était fort (sens du verset) : « Allah vous crée d’abord faible, puis Il fait succéder la force à la faiblesse, pour vous réduire ensuite à la faiblesse et à la vieillesse ; »(Coran : 30/54), par un traitement dénué de toute forme de politesse, de générosité et de charité. Ainsi abandonné, il s’exposera à toute sorte de problèmes psychologiques, le rapport entre le mauvais traitement des personnes âgées et les problèmes psychologiques qu’elles rencontrent est proportionnel ; plus les mauvais traitements continuent, plus les problèmes psychologiques éprouvés augmentent et inversement.
La violence envers les personnes âgées est un des problèmes sociaux qui sont soustraits aux regards des autres dans la mesure où elles sont prises pour cible par les personnes qui leur sont les plus proches. Par conséquent, il est difficile, voire impossible de découvrir à temps leurs mésaventures pour les traiter, les identifier et en cerner les causes et les motifs. Récemment, ils ont heureusement attiré l'attention des spécialistes et des chercheurs.
«Sa tête aux cheveux blancs, bandée, ses gémissements brisent le cœur, la tristesse remplit ses yeux, il s’agit d’une mère qui vivait seule après le mariage de ses enfants et qui est tombée dans les toilettes de sa maison. Cette mère est restée toute une journée entrain de gémir et de saigner jusqu’à ce que son fils qui s’en est souvenu soit venu lui rendre visite. Il la transporta alors l'hôpital, l’y abandonna seule face à son sort tragique et s'en alla la conscience tranquille ! (Voir "La tragédie des parents abandonnés sur les lits des hôpitaux, Encyclopédie de la religion est le conseil "). »
Il y a une histoire vraie qui s’est déroulée il y a de cela cinq ans dans la capitale de notre cher royaume. En voici le résumé :
Il s’agit d'un homme marié qui a des enfants, dont l’aîné a sept ans. Son père qui est très vieux vivait avec lui sous le même toit. Devant l'insistance de sa femme qui, avec sa langue douce, ne cesse de lui recommander de mettre son père dans une pièce de la mosquée jouxtant la maison afin qu'il puisse, lui conseilla-t-elle, aller et revenir sans difficulté au domicile. Aussi elle s’est engagée à en prendre le plus grand soin et à répondre promptement à tous ses besoins. Impuissant, l’homme posa le problème à son père qui n'avait pas d'autres choix que d'accepter à contrecœur. Il se rendit alors au marché, accompagné de son fils aîné âgé sept ans pour acheter un matelas, un lit, une armoire et autres meubles destinés à la chambre de son père dans la mosquée. Par un heureux concours providentiel pour le moins inattendu, son jeune fils s’enquit auprès de lui de ce qu'il allait acheter et pourquoi ?
Il répondit : « C'est pour ton grand-père qui va loger dans l’une des pièces de la mosquée à côté de la maison. Le petit garçon, lui demanda, mine de rien : « Quand va-t-on t’acheter pareil ameublement, ô papa?! » Cette question, quoiqu’innocente, fut foudroyante pour le père qui sentit alors la terre tremblée sous ses pieds. Réveillé de son coma, il rendit au propriétaire du magasin tout ce qu’il vient d’acheté de chez lui et n'attendit guère qu'il lui rende son argent. Plein de honte, il revint en toute vitesse à la maison et se mit à embrasser son père en se confondant d’excuses devant lui, l'assurant qu'il aura la meilleure place de la maison et qu’eux ils se suffiront du reste. Quant à l’épouse désobéissante, il lui demanda de choisir entre son père et ses fils et entre la maison de sa famille. C’est que l'homme a pu revenir à la raison. Allah lui éclaira le cœur. La récompense est de la même nature que l’acte, et la sanction est de la même nature que le crime commis, la sanction d’une mauvaise action est une autre action de même nature "(Extrait d'un article écrit par le Dr. Sulaiman Bin Abdel Rahman Al–Angari pour Journal Al-Jazeera du 12 Ramadan 1421 de l'hégire)
Nous pouvons dire que la violence domestique dirigée contre les personnes âgées, les parents ou les proches peut se manifester sous plusieurs formes. Parmi ses formes les plus courantes nous pouvons citer :
- Les priver de la nourriture et des médicaments,
- ne pas prêter suffisamment d’attention à leur hygiène personnelle ou à la propreté et à la sûreté du lieu où ils vivent,
- ne pas assurer leurs besoins,
- ne pas organiser leurs rendez-vous médicaux,
- les battre,
- les emprisonner,
- les isoler de la société ou les abandonner,
- les gronder, les menacer, les intimider ou les fustiger.
Gloire à notre Seigneur, le tout puissant, qui dit (sens du verset): « Ton Seigneur t’ordonne de n'adorez que Lui, de traiter avec bonté ton père et ta mère. Et si l'un d'eux ou tous deux atteignent auprès de toi, un âge avancé, ne leur dis pas: "Fi ! " Ne leur manque pas de respect, mais adresse-leur des paroles respectueuses ! Et par miséricorde, fais preuve à leur égard d’humilité et adresse à Allah cette prière : " Seigneur ! Sois miséricordieux envers eux comme ils l’ont été envers moi, quand ils m’ont élevé tout petit" » (Coran : 17/23 et 24).
En interprétant ce verset, Al-Qortubi (qu’Allah lui accorde Sa miséricorde) a dit: «Le verset s’est attardé sur le cas de la vieillesse car c’est la situation dans laquelle le père et la mère ont le plus besoin de l’obéissance de leurs enfants, à la suite du changement consécutif à l'âge et à la faiblesse. Leur cas devenant plus préoccupant, Allah a astreint leurs enfants à être davantage à leurs soins, beaucoup plus que par le passé car désormais ils n’ont qu’eux pour survivre. Ils sont arrivés à un stade de faiblesse où ils ont besoin de voir leurs enfants leur rendre la pareille en se souvenant de ce qu'ils leur faisaient quand ils étaient des enfants impuissants . C’est pourquoi leur situation a été soulignée à part ". (Voir Tafsir Al-Qortoubi 10/214)
Quant à la situation des domestiques elle n’est guère plus heureuse. Jugez-en:
«La locataire de la maison a reconnu avoir torturé, puni et brûlé par le feu sa domestique, ce qui a causé sa mort de cette dernière. Le médecin légiste qui a examiné la dépouille mortelle a constaté l’existence de brûlures disséminées dans tout le corps de la victime, avec un avant-bras cassé, en plus de quatre côtes brisées dans la poitrine. Aussi les brûlures du corps ont commencé à moisir et à se putréfier. On a également découvert des traces de coups anciens sur son corps et sur sa tête. La femme qui était une enseignante a reconnu qu’elle emprisonnait la domestique et la torturait parce qu’elle ne savait pas faire correctement son travail.» (Le journal de ‘Okaz du mercredi 2 Rabi al awal 1428, Numéro: 2103
Quiconque a un grain de foi restera toujours et à juste titre étonné en comparant la scène que nous venons de relater avec celle qui suit, racontée par Abou Massoud Al-Ansari (qu’Allah soit satisfait de lui) : « Une fois que j'étais entrain de frapper un garçon j’ai entendu une voix derrière moi qui me dit : «ô Abou Massoud sache qu’Allah te maîtrise plus que tu ne maîtrises ce garçon». Je me suis alors tourné et quelle ne fut pas ma surprise de voir qu’il s’agit du Messager d'Allah – – je lui dis alors : « Ô Messager d’Allah, il est libre et affranchi pour le plaisir d’Allah ». Le Prophète répondit : «Si tu ne l’avais pas fait le feu de la Ghenne t’aurait consumé ou brûlé.» (Rapporté par Mouslim).
Hilal bin Sayyaf, quant à lui dit a : "Sous l’effet de la colère, un vieil homme a frappé son domestique, Soueide ibn Moukharrin qui a vu la scène lui dit : "Tu ne peux t’en sortir qu'en l’affranchissant ". Avant d’ajouter "Nous étions sept frères et nous n’avons qu’une seule domestique à notre service et le Messager d'Allah - –n’a pas hésité à nous ordonner de l’affranchir lorsque mon frère cadet lui a administré un coup ". (Rapporté par Mouslim).
Rien à voir avec ce qui se passe au vingtième siècle : « Une domestique indonésienne a été, pendant tout un mois, brutalement torturée par son employeur et sa femme ce qui a entraîné une paralysie totale de ses membres. Etant devenue atteinte de la gangrène ses médecins ont été unanimement favorables à l’amputation de ses quatre partis. Selon les informations fournies il parait que l'employeur a, pendant tout un mois, lié la domestique par une corde dans la cour de sa maison au soleil. Au cours de cette période il la frappait régulièrement avec des fils de fer, lui brisant les dents et lui coupant les lèvres.» Site d'Al Arabia. Net, le samedi 16 Safar 1426 H
Qu’Allah soit loué, il n'y a de force qu'en Lui ! Mais à quel genre de personnes appartiennent ces gens ? Quels cœurs ont-elles ! Qu’ont-ils fait des orientations du Prophète de la Miséricorde – Salla Allahou Alaihi wa Sall – qui a dit: « Vos domestiques sont vos frères. Allah vous les a confié ; quiconque a la responsabilité de son frère doit le nourrir de ce qu’il mange et le vêtir de ce qu’il porte. Il ne doit pas le charger d’un travail dont il ne pourra venir à bout, sinon, il devra l’aider à le faire. » (Boukhari et Mouslim)
Les images de la violence exercée sur la main d’œuvre et sur les domestiques prennent des formes aussi dures qu’insupportables. Elles comportent ,entre autre, les insultes, les brimades, l’usage de mots déplacés, l’emprisonnement, le passage à tabac, l’intimidation, la menace, la privation de la nourriture, des vêtements et du logement convenable, l'assignation de tâches plus dures qu’ils ne peuvent supporter, ne pas leur donner suffisamment de temps pour se reposer, les empêcher de prendre contact avec leurs familles, attenter à leurs biens, le non payement ou le retardement de leurs salaires.
Nous sommes responsables devant Allah de la main d’œuvre et des domestiques sous notre contrôle. C’est pourquoi le Prophète () a dit dans un hadith Qoudoussi: « Allah, exalté soit-Il, dit: Je serai le Jour de la Résurrection l’adversaire de trois personnes: un homme auquel on accorde confiance en raison d'un engagement pris en Mon Nom et qu'il trahit ensuite, un homme qui vend un homme libre et consomme son prix et un homme qui loue les services de quelqu’un sans le payer rubis sur ongle une fois la tâche accomplie. » (Rapporté par Al-Boukhari)
Allah, exalté soit-Il, a dit vrai (sens du verset): « Au Jour de la Résurrection, Nous placerons les balances exactes. Nulle âme ne sera lésée en rien, fût-ce du poids d'un grain de moutarde que Nous ferons venir. Nous suffisons largement pour dresser les comptes. » (Coran: 21/47)
Allah, exalté soit-Il, a dit vrai (sens du verset): « Au Jour de la Résurrection, Nous placerons les balances exactes. Nulle âme ne sera lésée en rien, fût-ce du poids d'un grain de moutarde que Nous ferons venir. Nous suffisons largement pour dresser les comptes. » (Coran: 21/47)