La compassion et la pitié comptent parmi les vertus du musulman. La pitié a pour racine la clarté et la pureté de l'âme.
Le musulman doit pratiquer la pitié, prendre part au malheur des autres et recommander d'en faire preuve, ainsi qu’Allah, exalté soit-Il l'a prescrit dans le Coran. Allah, exalté soit-Il, dit (sens du verset) :
"[...] Ceux qui rachètent les captifs, nourrissent en temps de disette un parent orphelin ou un pauvre réduit au dénuement, tout en étant du nombre de ceux qui ont la foi, qui s'incitent mutuellement à la constance et à la commisération.Ceux-là seront les gens de la droite !" (Coran : 90/17-18)
Plusieurs hadiths du Prophète Mohammed () abordent la pitié et la bonté du cœur en soulignant leur importance dans la vie individuelle et sociale. Parmi ces hadiths nous pouvons citer à titre d’exemple les suivants :
« Ayez pitié de ceux qui vivent sur terre, Celui Qui est au ciel aura pitié de vous.» (Rapporté par At-Tabarani et Al-Hakim)
« Allah est miséricordieux envers ceux qui ont bon cœur.» (Rapporté par Ibn Abi Chayba et bout d’un hadith rapporté par Boukhari)
« La tendresse ne fait défaut que dans le cœur d'un damné » (Mouslim)
« Le Tout-Miséricordieux est clément avec ceux qui le sont. Soyez clément envers votre prochain et Allah sera clément envers vous.» (Rapporté par At-Tirmidhi et Abu Dawoud)
« L'image des croyants dans les liens d'amour, de miséricorde et de compassion qui les unissent les uns aux autres est celle du corps : dès que l'un de ses membres est malade, tout le reste du corps souffre d'insomnie et de fièvre. » (Rapporté par Boukhari et Mouslim. Cette version appartient au dernier).
« Le croyant envers son frère croyant est comparable à un édifice dont les briques se soutiennent les unes les autres. » (Boukhari et Mouslim)
La pitié n'est que tendresse et sympathie. Elle suscite grâce et bonté. Mais elle n'est jamais un sentiment stérile. Elle se traduit, au contraire, à l'extérieur par des actes réels tels que : pardon aux offenses, secours aux angoissés, assistance aux faibles, assouvissement de la faim des faméliques, habillement des dénudés, soins aux malades, consolation des affligés et plusieurs autres actes semblables qui sont tous le fruit de la pitié.
L'imam Boukhari rapporte qu'Anas () a dit:
« Nous sommes allés, le Prophète () et moi, voir Abou Yousseph, le mari de la nourrice d’Ibrahim, fils du Prophète. Le Prophète () prit son enfant dans ses bras, le serra contre lui et l’embrassa. Nous sommes allés encore une autre fois, mais l'enfant était agonisant. Les yeux du Prophète se mirent à verser des larmes. Abderrahmane Ibn ‘Awf qui était présent avec nous lui dit : "Toi aussi, Messager d’Allah, tu pleures ! "
"Ô Ibn ‘Awf", dit le Prophète, "ce sont des larmes de tendresse" avant d’ajouter : "Les yeux versent leurs larmes, le cœur s'afflige, mais nous ne disons que ce qui plaît à Allah. Nous sommes bien tristes de ta perte, ô Ibrahim !»
Dans une autre occasion, le Prophète () pleura alors qu'il était allé rendre visite à son petit-fils. Assis sur le lit, il le porta agonisant entre ses mains. Les yeux de l’enfant étaient gelés et ne faisaient aucun mouvement. Le Prophète () se mit à pleurer lorsqu'il s'en aperçut. Sa'ad lui demanda : « Qu'est-ce qui se passe, ô Messager d'Allah ? – C’est, répondit-il, la manifestation de la compassion qu’Allah, exalté soit-Il a placée dans le cœur de l’homme. Allah, exalté soit-Il, n’est compatissant qu’envers ceux de Ses adorateurs qui sont eux-mêmes compatissants. » (Rapporté par Al-Boukhari).
C'est une marque d'affection de la part du Prophète () que d'aller voir l'enfant chez sa nourrice, de l'embrasser et de serre contre lui. C'est de la tendresse de sa part que de lui rendre visite dans son agonie et de le pleurer.
Boukhari a rapporté aussi le fait suivant d'après Abou Houreira () : « Un homme, poursuivant son chemin, éprouva une soif ardente et descendit dans un puits pour se désaltérer. Quand il remonta, il vit un chien haletant de soif, léchant l'humidité du sol. Ce chien, se dit-il, éprouve la même sensation de soif que moi. Alors, il redescendit, remplit sa chaussure d'eau, la prit par la bouche, remonta et donna à boire au chien. Son geste fut agréé par Allah qui lui accorda rémission de ses péchés.» Sommes-nous récompensés, dirent les compagnons, pour les bienfaits dispensés aux animaux ?
"Oui, tout bienfait à tout être vivant est rétribué [par Allah] ", dit le Prophète.
Il a dit également : «Pendant que quelqu'un poursuivait sa route, il trouva une branche épineuse qu'il retira de la route. Allah loua son acte et lui accorda Son absolution. » [Rapporté par Al-Boukhari et Mouslim]
Le Prophète () a dit aussi : « Toutes les créatures constituent la Famille d’Allah (exalté soit-Il) et Sa créature préférée, c’est celle qui est bienfaisante envers Sa Famille. » (Boukhari)
C’est aussi une marque de commisération de la part de cet homme qui prit la peine de descendre dans le puits, d'y puiser de l'eau et de désaltérer ce chien assoiffé et de l’autre qui prit la peine d’écarter cette branche épineuse du chemin emprunté par les gens.
Si ce n'était pas la pitié qui a ému ces deux hommes, ils n'auraient pas agi ainsi.
A l'opposé de cet exemple, al-Boukhari, toujours selon Abou Houreira, rapporte le fait suivant :
« Une femme a mérité les tourments de l'enfer pour avoir emprisonné une chatte et l'avoir laissée mourir d'inanition. Ce fait lui a valu l'enfer. [Il lui sera dit] "Tu l'as laissée sans boire et sans manger dans sa prison, tu ne l'as ni nourrie, ni relâchée pour manger des insectes de la terre ! " »
Cet acte est un aspect de dureté de cœur, de carence de pitié que l'on ne peut rencontrer que chez un damné.
Al-Boukhari a rapporté également d'après Qatada un hadith dans lequel le Prophète () dit :
« Je commence quelquefois la prière avec l'intention de la prolonger. Mais, entendant les pleurs d'un petit enfant, je la raccourcit, sachant que ses cris tourmentent sa mère.»
Ainsi, renoncer à allonger la prière à cause des pleurs d'un enfant qui troublent sa mère est un aspect de pitié. C'est un don que la grâce divine attribue aux cœurs des gens compatissants.
Abou Mas’oud Al Ansâry (Radhiya Allahou anhou) rapporte qu’un homme dit un jour au Prophète () : « Par Allah ! Ô Messager d’Allah, je vais sûrement m’abstenir de la prière du matin à cause d’untel qui la fait durer trop longtemps ». Jamais, dans aucune de ses admonitions, je n’ai vu l’Envoyé d’Allah () se mettre dans une colère aussi violente que ce jour-là. « Alors, s’écria-t-il, il y en a donc parmi vous qui veulent faire fuir les fidèles ! Quel que soit celui d’entre vous qui dirigera la prière des fidèles, qu’il la fasse courte ; car, parmi les fidèles, il y a des personnes faibles, âgées ou trop pressées » (Rapporté par Al-Boukhari).
On raconte qu'un homme insulta Zaîn Al-Abidin (Ibn Ali Ibn Hossen petit-fils du Prophète, ) qui se dirigeait vers la mosquée.
Ses domestiques accoururent pour le battre. Mais Zaîn Al-Abidin les en empêcha. Puis, s'adressant à celui qui l'avait insulté, il lui dit: « Homme ! Je mérite plus que ce que tu as dit ! Ce que tu ignores de moi, dépasse de loin ce que tu connais. Si tu veux, je peux te le citer ! »
L'homme rougit. Zaîn Al-Abidin enleva alors son manteau et l'en revêtit. Il ordonna à ses gens de lui remettre mille dirhams.
L'oubli de ces injures et cette charité sont deux marques de bonté de cœur de la part du petit-fils du Prophète Mohammed ().