La mort, la réalité oubliée
Le sujet que nous abordons aujourd’hui est un sujet que nombre de gens rechignent souvent à aborder et dont maintes personnes n’aiment pas entendre parler : il s’agit de la mort.
Il est consternant de voir comment une personne croyante en Allah et en Son Messager rechigne à parler de la mort ou se sent mal à l’aise lorsque le sujet est évoqué. Pourtant, le Messager d’Allah, , a dit : « Rappelez-vous constamment le destructeur des plaisirs et le diviseur des groupes, car chaque fois qu’on l’évoque devant une grande quantité, celle-ci s’amoindrit, et chaque fois qu’on l’évoque devant une petite quantité, celle-ci prend de l’ampleur », c’est-à-dire que chaque fois que la mort est évoquée devant une grande quantité de péchés, de déviances et de passions, cela a pour effet de les amoindrir en nombre, et chaque fois qu’elle est évoquée devant une petite quantité d’œuvres pies et d’actes de culte, cela a pour effet de leur donner plus d’ampleur.
Se souvenir de la mort tout en connaissant sa réalité est de nature à limer les griffes de l’iniquité et à briser les crocs de l’injustice et de la tyrannie. Se souvenir de la mort tout en connaissant sa réalité est de nature à éradiquer la corruption sous toutes ses formes au sein de la société. Se souvenir de la mort tout en connaissant sa réalité est de nature à soigner les mœurs. Qui pourrait bien nous indiquer un moyen permettant de soigner les mœurs des sociétés ? Combien de chercheurs en sciences sociales aimeraient trouver cette recette ? Comment les sociétés, tant les individus que les collectivités, pourraient-elles se parer de valeurs humaines morales si elles se détournent de la mort, l’ignorent et oublient qu’elles ont un rendez-vous avec elle ? C’est pourquoi l’Élu, , a dit : « Rappelez-vous constamment le démolisseur des plaisirs et le diviseur des groupes, car chaque fois qu’on l’évoque devant une grande quantité, celle-ci s’amoindrit, et chaque fois qu’on l’évoque devant une petite quantité, celle-ci prend de l’ampleur ».
Le souvenir de la mort est le frein qui nous permet d’avancer sur une pente l’esprit tranquille, sans craindre de tomber, de nous écraser et de périr. Chacun sait que lorsqu’on s’apprête à s’engager sur une pente, on s’assure avant de se lancer d’avoir un frein pour réguler la progression.
Pour cette raison précise, le verbe divin fait montre d’une étonnante précision lorsqu'Il cite la mort avant la vie, alors que nous savons tous que la mort, aussi bien au plan de son apparition matérielle, qu’au plan chronologique, ne vient qu’après la vie. Mais Allah, Exalté soit-Il, veut nous enseigner que la mort, bien qu’intervenant après la vie, est le frein qui garantit la sécurité de l’homme dans son cheminement vers Allah. C’est pourquoi Il dit : « Gloire à Celui Qui détient la Royauté : Il est Omnipotent. Celui Qui a créé la mort et la vie afin de vous éprouver pour voir qui parmi vous accomplira les meilleures œuvres. C’est Lui le Puissant, le Pardonneur. » [S67/V1 et 2]
Le sujet de la mort, dont beaucoup de gens rechignent à parler, met mal à l’aise toutes ces personnes grisées qui se vautrent dans leurs désirs et leurs passions, et qui rivalisent d’avidité pour amasser les débris insignifiants de ce bas-monde terrestre. Nous devons écouter ce que le Messager, , a dit à ces gens qui détestent la mort avec laquelle ils ont un rendez-vous certain. Le Très-Haut n’a-t-Il pas dit : « Dis : "La mort que vous fuyez va certes venir à votre rencontre. » [S62/V8]
N’a-t-Il pas dit : « Toute âme goûtera la mort. Mais c’est seulement au Jour de la Résurrection que vous recevrez votre entière rétribution. » [S3/V185]
Et N’a-t-Il pas dit à Son bien-aimé Élu : « Certes, tu mourras et ils mourront également. » [S39/V38]
Mais qu’est-ce donc que la mort? Quelle est cette mystérieuse raison qui fait que beaucoup de gens n’aiment pas en entendre parler et sont mal à l’aise lorsqu’elle est évoquée ? Beaucoup de gens s’imaginent que la mort est un néant, à l’image d’une lampe qui éclairait une pièce habitée, puis qui s’éteint, plongeant la pièce dans une obscurité totale. La mort est-elle ainsi ? A Dieu ne plaise. Cette conception de la mort est une contagion qui nous est parvenue de l’Occident. Combien nombreux sont les mythes et les chimères qui nous sont parvenus de l’Occident et que nous adoptons avec fierté ! Pour les Occidentaux, la mort c’est le néant. C’est pour cette raison que l’on dit aujourd’hui qu’un tel a été condamné à l’anéantissement, Iîdam, pour dire qu’il a été condamné à mort. Mais en réalité, la mort n’a jamais été synonyme d’anéantissement.
Qu’est-ce donc que la mort? La mort est la troisième d’une série de quatre étapes prescrites par Allah, Exalté soit-Il, et que l’homme doit traverser au cours de sa vie. Ô fils d’Adam, tu as rendez-vous avec quatre étapes tout au long de ta vie :
- La première étape est la vie fœtale pendant laquelle le fœtus est dans le monde utérin ;
- La deuxième étape est la vie terrestre dans laquelle nous évoluons aujourd’hui ;
- La troisième étape est la vie d’outre-tombe, Al-Hayat Al-Barzakhiya, avec laquelle nous avons rendez-vous incessamment ;
- La quatrième et dernière étape est la vie de l’au-delà.
Chacune de ces quatre étapes est plus consistante et plus étendue que celle qui la précède. La vie terrestre est bien plus étendue que la vie dans le monde utérin où nous évoluions. De même, la vie d’outre-tombe est beaucoup plus étendue et plus consistante que cette vie terrestre.
Analysons ce problème d’un point de vue scientifique afin que nous comprenions que ces gens qui rechignent à parler de la mort et qui la fuient, sont ainsi parce qu’ils vivent dans des nids de légendes. Quant à nous, musulmans, nous fuyons les légendes au profit des réalités scientifiques. L’homme a deux dimensions, qu’il vive à la surface de la terre dans la vie terrestre, ou dans les entrailles de la terre dans la vie d’outre-tombe. Dans ces deux situations, il a deux dimensions : il est constitué d’un corps et d’un esprit. Dans le monde terrestre où nous vivons, l’esprit est prisonnier de son enveloppe charnelle. L’esprit qui nous anime ne peut se mouvoir que dans la limite de la mobilité du corps. Lorsque nous passons à la vie d’outre-tombe, la situation s’inverse. Le corps devient dépendant de l’esprit. L’esprit s’affranchit de la prison où il était retenu tout au long de notre vie terrestre. L’esprit ressemble alors à ce soleil rayonnant en plein jour : il est détaché de la terre dans son essence, mais il lui est lié par ses rayons. De même, l’esprit du défunt est détaché de son corps dans son essence, mais il reste lié à lui quel que soit son emplacement et malgré la dispersion de son rayonnement.
Ainsi se réalise le sens du supplice de la tombe que peut subir l’être humain, mais aussi la félicité de la tombe qu’il peut connaître. Le verbe divin est donc parfaitement véridique lorsqu’Il relate dans la sourate Yâ-Sin l’histoire de cet homme croyant qui exhortait son peuple à croire en Dieu et qui a été assassiné. Que dit le Très-Haut à son sujet ? « On lui dit: "Entre au Paradis". Il dit: "Ah si seulement mon peuple savait que mon Seigneur m’a pardonné et mis au nombre des bienheureux ". » [Versets 26 et 27]
Cela a-t-il lieu le Jour de la Résurrection ? Non, cela a lieu durant la vie d’outre-tombe. La preuve en est cette parole prononcée par ce croyant : « Ah si seulement mon peuple savait que mon Seigneur m’a pardonné et mis au nombre des bienheureux ».
Le verbe divin est tout aussi véridique lorsqu’il évoque le sort de Pharaon et de son parti : « Ils sont exposés au Feu matin et soir ». Puis Allah poursuit en disant : « Et le jour où l’Heure arrivera, il sera dit : "Faites entrer le parti de Pharaon au plus terrible des supplices". » [S40/V46]
La mort n’est pas le néant. La mort est une existence encore plus consistante, plus étendue et plus effective que la vie que nous menons aujourd’hui.