Les conditions du califat

8-5-2016 | IslamWeb

Question:

Les gens de la Sunna et du consensus (ahl al-Sunna wa-l-Djamâ’a) sont-ils d'accord sur les conditions du califat, et quelles sont les positions des quatre écoles de jurisprudence sur cette question ?

Réponse:

Louange à Allah et que la paix et la bénédiction d'Allah soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses compagnons :

 

La fonction de calife est la plus haute position religieuse. En effet, celui qui atteint cette position prend la place du Prophète () et est responsable de la protection de la religion et de la gestion des affaires de la nation. C’est pourquoi les conditions nécessaires pour être calife sont nombreuses. Nous allons citer, si Allah, exalté soit-Il, le veut, les conditions à propos desquelles les oulémas sont tombés d’accord, puis nous mentionnerons celles à propos desquelles ils ont divergé. Ils se sont accordés sur les conditions suivantes :

 

-      Etre musulman. Il n’est pas permis de prêter serment d’allégeance à un mécréant. Allah, exalté soit-Il, dit (sens du verset) : « […] Et jamais Allah ne donnera une voie aux mécréants contre les croyants. » (Coran 4/141) Comme l’a dit ibn Hazm, qu'Allah lui fasse miséricorde, l’imamat est : « la plus grande voie. » Cette voie est donc la première à être bloquée devant les non musulmans et interdite pour eux.

-      Etre responsable. c’est-à-dire être sain d’esprit et pubère. Un enfant et un fou ne peuvent donc pas prétendre au califat, car ils sont eux-mêmes sous la responsabilité d’autres personnes et ne peuvent ainsi pas être responsables des Musulmans.

-      Etre un homme : le califat de la femme n’est pas valide, car Abû Bakra, qu'Allah soit satisfait de lui, a rapporté que le Prophète () a dit : « Jamais ne réussira un peuple qui confie la gestion de ses affaires à une femme. » (Boukhari) De plus, le califat fait porter à la personne qui l'exerce  une lourde responsabilité incompatible avec la nature de la femme. L'Islam veut donc éloigner la femme de cette responsabilité et ne pas lui imposer ce fardeau, d'abord par miséricorde et par compassion et ensuite pour éviter qu'elle ne s’égare.

-      Etre compétent : c’est-à-dire avoir l'audace, le courage et l'aptitude à  diriger la guerre et les affaires politiques et à protéger la nation.

-      Etre libre : l’esclave ne peut pas devenir calife, car il est occupé à servir son maître.

 

Les oulémas sont d'accord sur ces conditions mentionnées plus haut. Voici à présent les conditions à propos desquelles ils ont divergé :

 

-      Etre juste et être capable de faire des efforts d'interprétation. Les écoles malékite, chaféite et hanbalite sont d’avis que la justice et l’effort d'interprétation sont des conditions indispensables pour celui qui détient l’imamat et qu’il n’est pas permis de donner l’imamat à un débauché ou à une personne qui imite aveuglément les autres, sauf s'il n’y a plus aucune personne juste et capable de faire des efforts d'interprétation. Quant à l’école hanéfite, elle est d’avis que ces deux conditions sont préférables, mais pas obligatoires. Selon cette école, il est permis de donner l'imamat à un débauché ou à un pécheur même s’il existe des personnes justes et aptes à l'effort d'interprétation.  Cependant, il est préférable de privilégier ces dernières.

-      Avoir l'usage de ses mains et de ses jambes et ne pas être sourd ni aveugle. La majorité des oulémas sont d’avis que cette condition est nécessaire pour être dirigeant. Il n’est donc pas permis à une personne aveugle, sourde ou qui a les mains ou les jambes amputées d’occuper la fonction de calife et la personne qui perd l'usage de ses mains ou de ses jambes doit céder le califat à quelqu’un d’autre car elle ne peut plus veiller parfaitement aux intérêts des Musulmans. Or, l’objectif de l’imam ou de l'émir est de veiller aux intérêts des Musulmans selon les règles de la Charia. Tout ce qui entrave la réalisation de cet objectif entraîne l'invalidité du califat. Allah, exalté soit-Il, dit (sens du verset) : « […] Allah, vraiment l'a élu sur vous, et a accru sa part quant au savoir et à la condition physique. […] » (Coran 2/247)

Le savoir et la condition physique sont donc deux choses qui permettent de se distinguer des autres et sont nécessaires pour diriger. Certains oulémas estiment cependant qu'elles ne sont pas nécessaires. Selon eux, il n’y a pas de mal à ce que l’imam ait un défaut physique ou une maladie répulsive telle que la surdité, la cécité, qu’il soit amputé des mains ou des jambes ou qu’il ait la lèpre. Car cela n'a jamais été interdit par le Coran, la Sunna ou le consensus des savants.

Cependant, il est dans l'intérêt de la nation de durcir les conditions du califat en la donnant au plus fort plutôt que de faire preuve d’indulgence et d'alléger les conditions de l’imamat pour un intérêt personnel. Exiger de l'imam qu'il soit en bonne santé physique pour pouvoir assumer ses tâches est une chose qui ne devrait pas faire l'objet de divergences.

-      La lignée : la majorité des savants ont émis la condition que le calife soit issu de la tribu de Quraych, car le Prophète () a dit : « Les califes sont issus de la tribu de Quraych. » (Boukhari, Mouslim) al-Mâwardî, qu'Allah lui fasse miséricorde, a rapporté le consensus des oulémas sur cette condition. Mais certains oulémas ne sont pas d'accord. Ils s’appuyent sur la parole de ‘Umar, qu'Allah soit satisfait de lui, qui a dit : « Si Sâlim, l'affranchi d'Abû Hudhayfa était encore vivant j’en aurais fait mon successeur. » Toutefois, la chaîne de transmission de ces propos est faible. Dans son livre intitulé Kachf al-Khavâ, al-‘Adjalûnî attribue cette parole à Abû Na’îm et affirme que sa chaîne de transmission est faible. Même si cette parole est authentique, cela signifie que ‘Umar, qu'Allah soit satisfait de lui, n’avait pas eu connaissance de la parole du Prophète (), affirmant que seul un membre de la tribu de Quraych peut être calife ; mais cela est peu probable.

Le calife ne doit pas nécessairement être issu de la tribu de Banû Hâchim et ce à l’unanimité des quatre écoles jurisprudentielles, car les trois premiers califes n’en étaient pas issus et aucun compagnon ne leur reprocha cela durant leur califat. Ceci démontre qu’être issu de ces tribus n’est pas une condition de validité du califat.

 

Et Allah sait mieux.

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