Abû Hurayra, qu’Allah soit satisfait de lui, a dit : « Jusqu’à sa mort, le Prophète () entreprenait une retraite spirituelle pendant le dernier tiers du mois de Ramadan. L’année où il rendit l’âme, il la fit pendant vingt jours » (Boukhari).
Le Messager de cette communauté observait avec vigilance cet acte d’adoration, donnant à ceux qui lui sont fidèles, qu’il s’agisse de ceux qui s’adonnent à la da’wa, à la science, à l’enseignement et à la lutte pour la cause d’Allah, exalté soit-Il, ou de personnes ordinaires, une leçon sur l’importance de se consacrer à l’adoration d’Allah, exalté soit-Il, en se libérant de toutes les préoccupations et responsabilités.
Dans son Fî dhilâl al-Qur`ân, Sayed Qotb explique : « Toute âme dont on attend d’elle qu’elle exerce une influence sur la vie des hommes et la change, a besoin de solitude et d’isolement pendant un certain temps (…). Car quand l’âme s’absorbe dans la réalité de la vie présente, elle s’y habitue et se repose dessus et n’essaye plus de la changer, mais quand elle s’en éloigne pour un certain temps et s’en isole, s’affranchissant ainsi de la captivité d’un quotidien mesquin et de préoccupations futiles, elle devient capable de voir ce qui est plus important et de ressentir un épanouissement sans avoir besoin des coutumes des gens ».
Cet acte d’adoration vise à réaliser ce qui suit :
1- Rattraper tout manque et pallier les défauts qui pourraient porter atteinte à la relation de l’homme avec son Seigneur, exalté soit-Il, à cause des préoccupations de la da’wa, de la recherche du savoir ou autres ou à cause des attaches mondaines, que sont l’épouse, les enfants, le travail, etc.
2- Consolider la relation avec Allah, exalté soit-Il, fondée sur la foi et fournir davantage d’occasions de dévotion qui purifient l’âme et la qualifient pour faire face aux tentations et pour sauver les autres de ces dernières, avec la volonté d’Allah, exalté soit-Il.
3- La retraite spirituelle est une occasion en or pour les étudiants en science religieuse de mettre en pratique ce qu’ils ont appris, d’autant plus que toute personne sensée ne peut admettre que quelqu’un apprenne aux gens de quoi les sauver sans lui-même appliquer ses enseignements. Le Prophète () a dit :
« Celui qui enseigne aux gens le bien mais ne met pas en pratique ses enseignements est comme une bougie qui éclaire les gens tout en se consumant » (Al-Albânî : Sahîh).
4- La retraite spirituelle est une occasion merveilleuse pour les prédicateurs et les éducateurs, primo pour remédier au manque qui les a atteints, du fait qu’ils sont occupés avec les êtres humains, et secundo pour élever le niveau de foi et d’actes d’adoration de leurs disciples. De nos jours, il est très clair que le zèle des vertueux sur le plan des actes d’adoration et du comportement, par rapport à ce qu’il devrait être pour réformer la société et l’élever au niveau de celle des pieux prédécesseurs, a tiédi. Voilà pourquoi il faut saisir l’occasion du mois de Ramadan en général et de la retraite spirituelle en particulier pour améliorer cette situation, en s’adressant aux individus.
5- La retraite spirituelle est une occasion en or pour tester la sincérité exclusive envers Allah, exalté soit-Il, dans l’accomplissement de toutes les œuvres. Cette question est trop importante pour être examinée uniquement d’un point de vue individuel, car la sincérité est à la base de l’acceptation de toutes les œuvres conformes à la Charia, dont celles qui s’inscrivent dans le cadre de la da’wa, de l’éducation et de l’enseignement. Il serait vraiment dommage que vous dépensiez de l’argent et prodiguiez des efforts, mais que vous n’atteigniez pas les objectifs déterminés par la Charia, parce que vous manquez de sincérité. En fait, cette dernière est fort menacée au sein du seul groupe, comme cela est connu.
6- La retraite spirituelle est une occasion pour le prédicateur de s’isoler et de réfléchir, et ainsi de juger son parcours, évaluer ses acquis et se demander s’il suit toujours le plan dressé pour atteindre son objectif fixé ; s’il en a dévié, dans quelle mesure ? A-t-il éventuellement besoin de rectifier son parcours, de revoir son but ou de le reformuler ? La retraite spirituelle constitue une occasion en or de s’isoler et réfléchir, profitant de l’éloignement de l’âme des plaisirs mondains, et d’imiter l’idéal qui rejette l’habitude. Par ailleurs, la retraite spirituelle représente une pause, après laquelle on reprend l’action sous une nouvelle forme, plus saine.
7- La retraite spirituelle est aussi une occasion en or pour régler un problème extrêmement délicat : faire des disciples une copie conforme de leur éducateur, ce qui est vraiment affligeant et dangereux. Car certaines instances pédagogiques instruisent les gens de sorte à en faire des clones de leurs enseignants, alors que le Prophète () formait des commandants et non pas des esclaves. Qui donc se souvient de ces éducateurs qui ont formé pour la nation musulmane les fondateurs des doctrines jurisprudentielles, les exégètes, les maîtres du hadith, les historiens, les ténors du djihad et d’autres ?
La retraite spirituelle est une occasion pour réorienter les disciples, en leur permettant de prendre un élan sans bride dans les horizons de la dévotion, et les aider à polir leur personnalité, à orienter leurs intérêts, à rendre sérieuse leur méthode de pensée et à adopter une indépendance disciplinée. Il suffit d’attirer l’attention sur cette question.
Il faut souligner que la retraite spirituelle, indispensable pour réaliser les objectifs ci-dessus, n’est pas celle qui fait des mosquées des dortoirs, des salons pour accueillir des invités, des salles à manger ou des lieux où les gens font connaissance et s’engagent dans des causeries vaines.
La retraite spirituelle requise est celle qui amène le musulman à imiter aussi fidèlement que possible la vie des pieux prédécesseurs. C’est celle au cours de laquelle les gens humbles devant Allah, exalté soit-Il, fondent en larmes durant leurs méditations, où les repentis lèvent les mains au ciel, implorant leur Seigneur, exalté soit-Il, les dévots et les chastes s’efforcent de ne pas passer un seul instant sans accomplir un acte d’obéissance.
C’est celle qui concrétise la notion d’auto-éducation en vue d’imiter les bienfaisants et pendant laquelle le musulman cherche à atteindre un rang élevé, ne cesse pas d’évoquer Allah, exalté soit-Il, de lire, de comprendre et de réfléchir sur Son Livre, observe l’accomplissement de la prière à son temps prescrit avec un parfait recueillement et veille la nuit en prière, avec délectation et crainte d’Allah, exalté soit-Il.
C’est celle qui est susceptible de libérer l’homme de nombreux comportements négatifs, des discours inutiles et du badinage. Or, le mélange excessif avec les autres a comme effet le plus dommageable de réduire le zèle de la personne à celui de ses compagnons.
C’est celle qui apprend à l’homme la sobriété dans la consommation des mets et des boissons, ce qui entraîne la tendresse du cœur, l’humilité de l’âme et l’affranchissement des chaînes de la passion, de l’indolence et de la paresse.
Dans son Sayd al-fawâ`id, Ibn al-Qayyim, qu'Allah lui fasse miséricorde, affirma : « Lorsque l’astre de la ferveur point dans la nuit du désœuvrement, suivi par la lune de la détermination, la terre du cœur resplendit de la lumière de son Seigneur ».
Faisons donc de la retraite spirituelle l’occasion d’un changement positif, tout en nous méfiant de chercher l’idéal pur, car cela est susceptible de produire un repli du zèle et un abandon total de la bienfaisance.
Nous implorons Allah, exalté soit-Il, de nous aider à Lui obéir, d’accomplir dûment les actes d’obéissances et de les accepter de nous de par Sa miséricorde et Sa grâce.
Par : Mohammad Ibn Yahia Moufrih