Le récit de Moise et d’Al-Kadhir: Les clauses échangées
22/07/2010| IslamWeb
Allah, exalté soit-Il dit (sens des versets):« Ils trouvèrent l'un de Nos serviteurs à qui Nous avions donné une grâce, de Notre part, et à qui Nous avions enseigné une science émanant de Nous.
Moïse lui dit : "Puis-je suivre, à la condition que tu m'apprennes de ce qu'on t'a appris concernant une bonne direction ? "
[L'autre] dit : "Vraiment, tu ne pourras jamais être patient avec moi.
Comment endurerais-tu sur des choses que tu n'embrasses pas par ta connaissance ? "
[Moïse] lui dit : "Si Allah veut, tu me trouveras patient; et je ne désobéirai à aucun de tes ordres".» (Coran : 18/65 à 69)
1 – Il ressort des versets précédents que chaque partie a dicté ses propres conditions avant de s’engager. Ainsi Moïse a pris un engagement sur lui-même d’obéir à Al-Khadir et de se conformer à ses ordres « et je ne désobéirai à aucun de tes ordres ».
Cela montre que le contractant a le droit de s’imposer des conditions s’il s’y engage. Al-Khadir a stipulé que Moïse s’abstienne de l'interroger tant qu’il n'a pas reçu de sa part une explication c'est-à-dire que Moïse ne doit pas être le premier à poser une question ou à demander une explication. Il devra laisser à Al-Khadir le soin de faire cela « "Si tu me suis, dit [l'autre,] ne m'interroge sur rien tant que je ne t'en aurai pas fait mention".» (Coran : 18/70) c'est-à-dire ne me demande pas d’éclaircissements, laisse moi faire. Donc Al-Khadir lui a posé comme condition au départ, avant même d’entamer le voyage, de ne lui poser aucune question et de ne jamais l'interroger sur ses actes jusqu’à ce que, de sa propre initiative, il s’en ouvre à lui.
2 – Le récit nous permet d’apprendre ceci : l’acceptation préalable par Moïse de la condition posée par Al-Khadir montre que l’élève doit se comporter poliment avec son enseignant. Moïse a dit « et je ne désobéirai à aucun de tes ordres » alors qu’Al-Khadir lui a imposé de ne lui poser aucune question, ce qui suppose de la part de Moïse, une acceptation tacite de toutes les conditions.
Cela veut dire que l’acceptation tacite peut être invoquée comme argument contre le contractant si, après avoir pris connaissance de la condition, il ne résilie pas le contrat. C’était le cas de Moïse qui a continué à accompagner Al-Khadir après avoir pris connaissance de la condition, même s’il n’a pas exprimé son acceptation de celle-ci.
3 – Le contrat est considéré exécutoire s’il n’est pas conditionnel. S’il est conditionné, la condition doit être valable du point de vue de la Charia à cause du hadith rapporté par Boukhari : «Toute condition non soutenue par le Livre d’Allah est nulle, fussent-elles cent. »
De même la condition ne doit pas être contraire aux dispositions du contrat. Par exemple un vendeur ne doit pas dire : je te vends cette voiture à condition de ne pas l’utiliser hors de la localité. Aussi la condition devient elle contraignante si elle est valable au départ comme le dit Al Ghadi Choureih : « quiconque s’impose librement une condition, il y devient assujetti.» (Voir Manar As-Sabil volume 1, page 313).
Il y a plusieurs catégories de conditions contractuelles qui peuvent être revêtues de la formule de l’offre et de la demande provenant de l’un des contractants ainsi qu’il suit :
1 – la suspension ;
2 – la restriction ;
3 – l’adjonction.
La suspension : le conditionnement de l’existence du contrat à l’existence de quelque chose d’autre de sorte que le contrat n’existera pas tant que cette autre chose n’est pas trouvée. Par exemple : l'un des contractants peut dire : je te vends ma maison si mon voisin accepte.
La restriction : il s’agit de prendre une formule qui limite la portée et les effets du contrat, comme par exemple le fait qu’un vendeur dise je te vend la voiture à condition que je l’utilise pour me rendre à telle localité.
L’adjonction : c’est le fait de faire reculer les effets du contrat pour une condition donnée. Par exemple : convenir que la date de prise d’effet d’un contrat de location court à partir d’un certain délai. Dans ce cas le contrat sera conditionné à un temps futur. (Voir le livre « Critères de contrat en jurisprudence musulmane »)
Revenons à Al-Khadir pour dire que c’était là le premier ordre qu’il donne à Moïse. Il reste entre eux deux une condition sur laquelle ils se sont mis d’accord : Moïse ne doit jamais commencer par poser une question à Al-Khadir concernant quoi que se soit de ce qu’il fait tant que celui-ci ne lui en a pas expliqué les raisons.
Quant à la législation qui découle du Hadith « Les musulmans sont contraints par leurs engagements, sauf à transformer le licite en illicite ou à transformer l’illicite en licite. » (Rapporté par Abou Dawoud et jugé authentique par Al-Albani)
Cela montre que si le contractant se pose une condition et que cette condition n’est pas susceptible de produire aucune contravention juridique alors l’autre partie devra s’engager à l’exécuter. Mais en cas de non respect de la condition, le contractant peut faire ce qui lui semble approprié pour préserver ses droits.